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Comptes à l'étranger, actifs numériques et assurance-vie : maîtrisez vos obligations déclaratives pour éviter des majorations et sanctions lourdes

Face à une demande de renseignements de l’administration fiscale, il est impératif d’agir rapidement. Les dossiers de régularisation peuvent être particulièrement complexes et chronophages, notamment en raison du droit de reprise de l’administration.

Categorie
Mobilité internationale
Date
19.12.24

Introduction : Les échanges automatiques d'informations au service de la lutte contre la fraude fiscale

En 2023, la France a reçu des informations sur 7,7 millions de comptes bancaires détenus à l’étranger par des résidents fiscaux français, transmises par les administrations fiscales des pays partenaires (communiqué de presse du 14 novembre 2024, n°26 du Ministère chargé du budget et des comptes publics). Ces données, échangées dans le cadre des dispositifs internationaux d’échange automatique d’informations, témoignent de la coopération renforcée entre États pour promouvoir la transparence et lutter contre la fraude fiscale.

Ces échanges automatiques sont encadrés par deux dispositifs majeurs :

  • Au niveau européen, la directive n° 2014/107/UE du Conseil du 9 décembre 2014, dite « DAC 2 » ;
  • Au niveau international, l’accord multilatéral entre autorités compétentes du 29 octobre 2014, initié par l’OCDE, connu sous le nom de Common Reporting Standard (CRS).

Grâce à ces dispositifs, les administrations fiscales transmettent chaque année des informations relatives aux comptes financiers des contribuables. En 2023, ces données ont permis à la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) de renforcer ses contrôles fiscaux : plus de 7 000 contrôles ont été réalisés, avec des droits et pénalités recouvrés pour un montant total de 210 millions d’euros, soit une hausse de 35 % par rapport à l’année précédente.

Ces résultats illustrent l’efficacité croissante de ces échanges pour détecter et sanctionner la dissimulation de comptes ou d’avoirs à l’étranger, notamment en matière d’impôt sur le revenu et de droits de succession.

Chez TaxLhab, nous sommes pleinement mobilisés pour accompagner les contribuables dans la régularisation de leurs comptes bancaires, contrats d’assurance-vie ou actifs numériques non déclarés à l’étranger. Face à une demande de renseignements de l’administration fiscale, il est impératif d’agir rapidement. Faire appel à un avocat spécialisé garantit une gestion stratégique et efficace de votre situation.

Les dossiers de régularisation peuvent être particulièrement complexes et chronophages, notamment en raison du droit de reprise de l’administration, qui s’étend jusqu’à la fin de la dixième année suivant celle de l’imposition concernée. Une réponse adaptée et conforme dans les délais impartis est essentielle pour limiter les risques de majorations et de sanctions.

Dans cet article, nous vous proposons un rappel synthétique de l’étendue des obligations déclaratives, ainsi que des majorations et sanctions applicables en cas de manquement.

Les obligations déclaratives des contribuables résidents fiscaux en France

Les personnes physiques ayant leur résidence fiscale en France sont, en principe, imposées à l’impôt sur le revenu sur l’ensemble de leurs revenus mondiaux, sous réserve des dispositions prévues par les conventions fiscales internationales. Dans ce cadre, les résidents fiscaux français sont soumis à plusieurs obligations déclaratives spécifiques, visant à garantir une transparence totale de leur patrimoine financier et numérique :

  • Les comptes bancaires détenus à l’étranger, qu’ils soient ouverts, utilisés, détenus ou clos, doivent être déclarés (article 1649 A du Code général des impôts - CGI) ;
  • Les contrats de capitalisation ou d’assurance-vie souscrits auprès d’organismes établis hors de France doivent également être déclarés (article 1649 AA du CGI) ;
  • Les comptes d’actifs numériques, tels que les portefeuilles de cryptomonnaies détenus sur des plateformes étrangères, sont soumis à une déclaration obligatoire depuis le 1ᵉʳ janvier 2020 (article 1649 bis C du CGI).

Ces obligations concernent une grande diversité de situations. Certains contribuables conservent des comptes bancaires ouverts à l’étranger lors de séjours professionnels ou pour des raisons familiales, par exemple après avoir hérité de comptes transmis dans le cadre d’une succession ou d’une donation. D’autres peuvent ouvrir des comptes à l’étranger pour des raisons fiscales, notamment dans des paradis fiscaux non coopératifs, afin de réduire ou d’éviter l’imposition de certains revenus. Ces comptes sont parfois détenus par l’intermédiaire de structures juridiques comme des trusts ou des fondations situés dans des juridictions telles que le Liechtenstein ou le Panama.

Il est également courant que les revenus financiers (intérêts ou dividendes) perçus à l’étranger soient faiblement imposés, voire exonérés dans certains cas, comme en Suisse ou en Belgique pour les plus-values sur actions. Ces pratiques, lorsqu’elles ne sont pas correctement déclarées, exposent les contribuables à des sanctions lourdes.

Déclaration des comptes bancaires détenus à l’étranger

En vertu de l’article 1649 A du Code général des impôts (CGI), tel que modifié par l’article 7 de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018, les personnes physiques, associations, et sociétés n’ayant pas une forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes bancaires ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger.

Évolution de l’obligation déclarative
Avant cette réforme, l’obligation ne s’appliquait qu’aux comptes « utilisés », c’est-à-dire à ceux ayant fait l’objet d’au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période concernée. Depuis le 1ᵉʳ janvier 2019, l’obligation de déclaration a été étendue à la simple détention passive de comptes, incluant ainsi les comptes inactifs ou dormants. Cette évolution marque un renforcement significatif des obligations déclaratives pour les contribuables.

Notion de compte bancaire
La notion de « compte » est interprétée de manière très large par l’administration fiscale. Selon le BOI-CF-CPF-30-20 (§120, 26 mai 2021), elle couvre tous les comptes ouverts hors de France auprès de personnes physiques ou morales recevant habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou fonds. Cela inclut notamment les comptes détenus auprès d’établissements bancaires, de prestataires de services d’investissement, d’administrations publiques, ou encore auprès de notaires ou agents de change.

Modalités déclaratives
Chaque compte ouvert, détenu, utilisé ou clos au cours de l’année ou de l’exercice doit être déclaré individuellement. L’obligation s’étend également aux comptes détenus par les membres du foyer fiscal, y compris les enfants à charge.

Pour se conformer à cette obligation, les contribuables doivent remplir le formulaire n° 3916, dont la version pour l'année 2023 est disponible sur le site de l'administration fiscale. Ce formulaire doit être joint à la déclaration de revenus papier ou complété en ligne dans l’espace personnel du contribuable avant la date limite de dépôt ou de télédéclaration.

Déclaration des comptes d’actifs numériques

En vertu de l’article 1649 bis C du Code général des impôts (CGI), les contribuables résidents fiscaux français doivent déclarer les comptes d’actifs numériques ouverts, détenus, utilisés ou clos au cours de l’année ou de l’exercice. Cette obligation s’applique également aux membres de leur foyer fiscal ainsi qu’aux personnes rattachées à ce foyer.

Notion de détention et d’utilisation
Un contribuable est réputé détenir un compte d’actifs numériques lorsqu’il en est titulaire, cotitulaire, bénéficiaire économique ou ayant droit économique. La notion d’« utilisation » s’applique dès qu’une opération de crédit ou de débit a été effectuée au cours de l’année, que cette opération soit réalisée par le titulaire du compte ou par procuration, pour son propre compte ou au profit d’un résident fiscal français.

Modalités déclaratives
Chaque compte d’actifs numériques, qu’il soit à usage privé, professionnel ou mixte (privé et professionnel), doit être déclaré distinctement. Pour ce faire, les contribuables doivent remplir le formulaire n° 3916-bis, accessible sur le site des impôts (www.impots.gouv.fr). Ce formulaire doit être joint à la déclaration de revenus papier ou complété dans l’espace personnel du contribuable lors de la télédéclaration, avant la date limite prévue.

Étendue de l’obligation
L’obligation déclarative s’applique à tous les comptes d’actifs numériques détenus auprès de plateformes étrangères ou de toute autre entité habilitée à recevoir des dépôts d’actifs numériques. Cette obligation vise à garantir une transparence accrue, notamment dans un contexte où les actifs numériques, comme les cryptomonnaies, sont souvent utilisés dans des transactions transfrontalières.

Sanctions et infractions pénales

Les obligations déclaratives relatives aux comptes bancaires étrangers et aux actifs numériques sont assorties de sanctions particulièrement dissuasives, prévues par l’article 1729-0 A et le 2 du IV de l’article 1736 du Code général des impôts (CGI). Ces sanctions varient selon que les sommes figurant sur les comptes étrangers ont été déclarées ou non.

Sanctions en cas de défaut de déclaration des comptes bancaires étrangers

  • Une amende forfaitaire de 1 500 € par compte non déclaré, portée à 10 000 € si le compte est situé dans un État ou territoire non coopératif (ETNC).
  • Une majoration de 80 % des droits dus si les sommes présentes sur ces comptes entraînent une rectification de l’impôt dû. Cette majoration ne peut être inférieure aux amendes précitées.

L’amende pour défaut de déclaration est prescrite à l’issue de la quatrième année suivant celle de l’infraction. Par exemple, une infraction commise en 2017 (déclaration de 2016) pouvait faire l’objet de sanctions jusqu’au 31 décembre 2021.

En outre, si un contribuable omet de déclarer un compte bancaire à l’étranger, les fonds transitant par ce compte sont considérés comme des revenus imposables, sauf preuve contraire apportée par le contribuable. Cette preuve doit démontrer que les sommes sont exonérées, déjà taxées ou hors du champ d’application de l’impôt.

Sanctions spécifiques aux actifs numériques
Pour les comptes d’actifs numériques non déclarés conformément à l’article 1649 bis C du CGI :

  • Une amende de 750 € par compte non déclaré ou de 125 € par omission ou inexactitude, plafonnée à 10 000 € par déclaration.
  • Si la valeur vénale des comptes dépasse 50 000 € à un moment quelconque de l’année, ces montants sont augmentés à 1 500 € par compte non déclaré et 250 € par omission ou inexactitude.

Pouvoirs élargis de l’administration fiscale
En cas de non-déclaration répétée au cours des dix dernières années, l’administration fiscale peut demander des justifications sur l’origine des fonds figurant sur les comptes étrangers. Si les réponses sont insuffisantes ou absentes, elle peut procéder à une taxation d’office au taux de 60 % applicable aux droits de mutation à titre gratuit.

Poursuites pénales pour fraude fiscale
L’administration fiscale peut également dénoncer les contribuables pour fraude fiscale devant le tribunal correctionnel lorsqu’elle établit l’intentionnalité de la fraude. Depuis la loi du 23 octobre 2018, cette dénonciation est obligatoire lorsque les rappels d’impôts excèdent 100 000 € et s’accompagnent de majorations d’au moins 40 %.

Le délit de fraude fiscale est passible :

  • D’une peine de 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €, portée au double du produit de l’infraction.
  • En cas de fraude fiscale aggravée, de 7 ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant atteindre 3 millions d’euros ou le double du produit tiré de l’infraction si celui-ci est supérieur.

Ces sanctions rappellent l’importance de respecter strictement les obligations déclaratives et soulignent la vigilance accrue des autorités en matière de contrôle fiscal.

Déclaration des contrats d’assurance-vie et de capitalisation

En vertu de l’article 1649 AA du Code général des impôts (CGI), introduit par l’article 37-III de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, les résidents fiscaux français sont tenus de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus, les contrats d’assurance-vie ou de capitalisation souscrits auprès d’organismes établis hors de France. Cette déclaration doit être effectué par le formulaire n. 3916.

Étendue de l’obligation
Cette obligation concerne tous les contrats souscrits auprès d’organismes étrangers visés à l’article 990 I du CGI, qu’il s’agisse de contrats garantissant des risques en cours de vie ou en cas de décès, ou d’assurances mixtes. Elle s’applique indépendamment des modalités de versement des primes (libres ou périodiques) et des prestations (versement d’un capital ou d’une rente).

La déclaration doit porter sur tous les contrats souscrits, modifiés ou dénoués au cours de l’année civile précédente, y compris ceux détenus par les personnes à charge du contribuable au sens des articles 196 à 196 B du CGI. Depuis le décret n° 2021-184 du 18 février 2021, l’article 344 C de l’annexe III du CGI précise les modalités de cette déclaration.

Sanctions en cas de défaut de déclaration
Les contribuables qui omettent de déclarer ces contrats s’exposent à des sanctions financières strictes :

  • Une amende de 1 500 € par contrat non déclaré, portée à 10 000 € si le contrat est détenu dans un État ou territoire non coopératif (ETNC).
  • Une majoration de 80 % des droits dus, applicable lorsque des rectifications d’impôt sont effectuées sur les sommes figurant sur ces contrats. Cette majoration se substitue aux amendes précitées, mais ne peut être inférieure à leur montant.

Régime particulier et présomption de revenus
Depuis 2012, une présomption de revenus pèse sur les contrats non déclarés : les versements effectués vers ou depuis un contrat d’assurance-vie non déclaré sont réputés constituer, sauf preuve contraire, des revenus imposables. Ces revenus sont également soumis aux contributions sociales et à une majoration de 40 %, assortie d’intérêts de retard.

Enfin, pour les contrats dont l’origine et les modalités d’acquisition ne sont pas justifiées, l’article 755 du CGI prévoit qu’ils sont réputés constituer un patrimoine acquis à titre gratuit, assujetti aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé du barème.

Période d’application des dispositions
Les dispositions actuelles de l’article 1649 AA du CGI s’appliquent aux manquements relatifs aux déclarations à souscrire à compter du 31 décembre 2016. Pour les manquements antérieurs, l’amende équivalente à 5 % de la valeur liquidative du contrat reste applicable.